L’application de fumier dans les champs, bien qu’essentielle pour la fertilité du sol, dégage souvent des odeurs désagréables qui affectent non seulement le paysage rural, mais aussi la qualité de vie des communautés avoisinantes. Cependant, une solution prometteuse pour atténuer ces odeurs réside dans l’utilisation de digestats issus des opérations de biométhanisation.
Le rôle des digestats issus des opérations de biogaz
Le digestat est un sous-produit de la digestion anaérobie, un processus biologique qui décompose les matières organiques dans un environnement sans oxygène en produisant du gaz naturel. Le digestat issu de ce processus est riche en nutriments, car les taux d’azote, de phosphore et de potassium sont neutres.
Le digestat est beaucoup moins odorant que le fumier brut en raison du processus de décomposition contrôlée dans le digesteur. Il contient des nutriments facilement assimilables, tout en faisant un conditionneur de sol et un engrais adapté, sans odeur envahissante comme le fumier brut.
La perception de l’odeur est très subjective, ce qui rend difficiles sa quantification et son utilisation comme base pour classer les substances comme ayant des odeurs meilleures ou pires. Les préoccupations concernant les odeurs nauséabondes émanant des matières fertilisantes résiduelles ont depuis longtemps préoccupé les communautés agricoles, incitant le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des parcs à classer ces substances en trois catégories distinctes. Ce processus de classification a impliqué une enquête publique approfondie qui a impliqué des universités, le ministre de l’Agriculture et le grand public. Dans le cadre de cette enquête, les participants ont été invités à évaluer diverses odeurs sur une échelle de 0 à 10, 0 représentant de l’eau pure et 10 représentants l’odeur la plus désagréable imaginable.
À titre de référence, le participant moyen a évalué le lisier de porc à 8 et le fumier de bovins solides à 4. S’appuyant sur ces évaluations, le ministère a établi trois catégories principales :
- Catégorie O1 : Ces substances sont moins odorantes que le fumier de bovins laitiers solides.
- Catégorie O2 : Ces substances présentent un profil olfactif similaire à celui du fumier de bovins laitiers solides.
- Catégorie O3 : Ces substances ont une cote d’odeur dépassant celle du lisier de porc.
Dans le cas de l’application moyenne du fumier de bovins, celui-ci tombe dans la catégorie O2. Cependant, un examen complet de six études sur les odeurs menées dans divers contextes de biométhanisation, utilisant différents fumiers animaux, a permis de conclure ceci : le processus de biométhanisation réduit considérablement les émissions d’odeurs. Dans certains cas, ces réductions atteignent jusqu’à 99 % par rapport aux équivalents bruts non traités. Dans chaque étude, les résultats indiquaient systématiquement des émissions d’odeurs réduites, souvent nettement inférieures à celles du fumier de bovins laitiers solides.
Par conséquent, en comparant le fumier de bovins à son équivalent digéré, nous pouvons le classer avec confiance dans la catégorie O1. Cette classification dite faible apporte une assurance aux agriculteurs et aux communautés agricoles qui envisagent d’utiliser des digestats comme source de nutriments pour remplacer leurs équivalents en fumier brut, avec l’avantage supplémentaire d’obtenir un transfert net de nutriments facilement assimilable par les plantes. Cette transition vers les digestats promet non seulement un soulagement pour les communautés agricoles, mais apporte aussi une pratique agricole plus durable et respectueuse de l’environnement.
Comprendre la question des odeurs
L’odeur du fumier provient principalement de la décomposition de la matière organique présente, entraînant la libération de composés volatils tels que l’ammoniac et les composés soufrés. Lorsque le fumier brut est appliqué dans les champs, ces composés odorants sont exposés à l’environnement ouvert, créant une odeur désagréable qui peut se propager sur de longues distances.
Avantages de la réduction des odeurs
- Réduction des émissions d’ammoniac : L’une des odeurs les plus puissantes et offensantes associées au fumier est l’ammoniac. Les digestats issus des opérations de biogaz contiennent généralement moins d’ammoniac, car la digestion anaérobie du fumier réduit la volatilisation de l’ammoniac. Cela se traduit par moins d’odeurs libérées dans l’environnement lorsque les digestats sont appliqués dans les champs.
- Décomposition contrôlée : La digestion anaérobie offre une décomposition contrôlée, ce qui réduit également la libération de composés odorants. Ce processus garantit que les émissions d’odeurs des digestats sont nettement inférieures au fumier brut.
- Réduction du transport des odeurs : Le profil olfactif réduit des digestats signifie que le transport des odeurs vers les communautés voisines est réduit au maximum. Cela constitue un avantage significatif pour les personnes vivant dans les zones rurales et à proximité des champs agricoles.
- Amélioration de la qualité de vie : En choisissant les digestats plutôt que le fumier brut, les communautés agricoles peuvent profiter d’une meilleure qualité de vie avec une réduction de l’exposition aux odeurs désagréables. Cela peut entraîner une amélioration du bien-être et de la satisfaction parmi les habitants.
Avantages environnementaux
Au-delà des avantages pour la communauté locale, l’utilisation des digestats pour réduire les odeurs offre plusieurs avantages environnementaux :
- Réduction de la pollution de l’air : Les émissions d’ammoniac plus faibles des digestats contribuent à réduire la pollution de l’air, ce qui peut avoir un impact positif sur la qualité de l’air et la santé humaine.
- Moins d’impact sur les écosystèmes : Les composés odorants du fumier peuvent avoir des effets négatifs sur les écosystèmes locaux. L’utilisation de digestats aide à minimiser ces effets, ce qui profite à la faune et à la biodiversité.
- Agriculture durable : L’intégration des digestats dans les pratiques agricoles favorise la durabilité en recyclant des nutriments précieux dans le sol. Cela améliore sa fertilité et réduit le besoin d’engrais chimiques.
L’utilisation des digestats issus des opérations de biométhanisation en remplacement du fumier offre aux communautés agricoles et à l’environnement une solution prometteuse au problème persistant des émissions nauséabondes. En optant pour les digestats, les pratiques agricoles deviennent plus respectueuses de l’environnement, avec moins d’odeurs, une meilleure qualité de l’air et une amélioration de la fertilité du sol de manière durable.
Alors que l’industrie agricole continue d’évoluer vers des pratiques plus respectueuses de l’environnement, l’adoption des digestats comme alternative viable au fumier à l’épandage au champ représente une étape significative vers une coexistence plus saine et plus harmonieuse entre l’agriculture et les communautés voisines.