Pour lire cet article en anglais, cliquez ici.
À l’échelle mondiale, les producteurs laitiers canadiens sont des précurseurs en matière de production durable. Ils font des efforts continus pour réduire leur impact sur l’environnement et améliorer la santé de l’industrie pour les générations à venir.
Dans un contexte d’évolution de l’environnement, de pression accrue des consommateurs qui exigent de plus en plus de durabilité et de transparence, et d’augmentation des connaissances sur les pratiques régénératrices, le maintien de notre position de leader en matière de développement durable est plus important que jamais.
Conscientes de ces défis et des opportunités qui existent dans ce domaine, des organisations comme Canards Illimités Canada (CIC) ont uni leurs forces à celles des Producteurs laitiers du Canada (PLC) pour soutenir les objectifs de durabilité des producteurs laitiers à l’échelle nationale.
Cette collaboration s’inscrit dans le cadre du plan des PLC visant l’atteinte de la carboneutralité des exploitations laitières d’ici à 2050. Elle est conforme à la vision de l’organisation visant une plus grande coopération avec des partenaires partageant les mêmes idées. « Nous sommes très fiers de ce partenariat […] qui vise à améliorer la biodiversité sur les entreprises agricoles, mais aussi à fournir des bénéfices environnementaux à la communauté locale et au-delà. Ce partenariat aura un impact positif sur la durabilité de nos paysages fonctionnels tout en protégeant des zones humides et des prairies, qui sont des habitats essentiels du Canada », a déclaré David Wiens, président des PLC.
La valeur de la biodiversité
Connie McLellan, spécialiste des programmes de conservation chez CIC, souligne l’importance de la biodiversité. « La biodiversité fait partie d’un système global. Le fait d’avoir une bonne biodiversité sur votre exploitation contribue à améliorer plusieurs éléments. Votre sol sera en meilleure santé, et il y aura plus de plantes qui attireront plus de pollinisateurs. Plus de pollinisateurs et un sol en meilleure santé égalent des cultures en meilleure santé. Cela se traduit par une augmentation de la production agricole sans ajout d’intrants supplémentaires », explique-t-elle.
Bien que de nombreuses initiatives en faveur de la biodiversité se passent au champ, McLellan souligne leur rentabilité pour les exploitations laitières. L’amélioration et la restauration de la biodiversité représentent des moyens peu coûteux d’accroître la production, ce qui permet aux agriculteurs de réaliser des économies qu’ils peuvent investir dans d’autres domaines de l’exploitation. L’amélioration de la santé des sols grâce à la restauration de la biodiversité favorise une meilleure rétention de l’eau et la production de cultures de meilleure qualité, qui à leur tour procurent une alimentation de meilleure qualité aux vaches, ce qui peut augmenter la production de lait. McLellan décrit ce phénomène comme l’« effet cascade » qui découle du choix de prioriser la biodiversité.
Dans le même ordre d’idées, Wiens souligne les avantages de la préservation de la biodiversité et reconnaît les possibilités qu’elle offre aux producteurs laitiers. En effet, ces initiatives sont conçues pour conserver la biodiversité tout en optimisant la rentabilité. « Nous répétons souvent que la durabilité environnementale n’est pas un pilier en soi. L’amélioration de la durabilité environnementale est synonyme de durabilité économique et sociale », explique Wiens.
Comment favoriser la biodiversité
Pour les exploitations qui souhaitent soutenir la biodiversité locale et les cours d’eau, il existe des programmes spécifiques adaptés aux différentes régions. Parmi les exemples, citons un programme qui encourage l’implantation de cultures de couverture pérennes afin de protéger le sol toute l’année contre l’érosion et la perte d’éléments nutritifs; des programmes pour les zones à faible rendement qui indemnisent les agriculteurs pour l’ensemencement de plantes fourragères vivaces; et la restauration de zones humides afin de fournir une source d’eau pour le bétail au pâturage, contrôler les inondations et augmenter les populations de pollinisateurs. La plupart de ces initiatives prévoient des compensations pour les entreprises agricoles sous la forme de paiements par hectare, de remboursement des coûts d’ensemencement et d’autres incitatifs financiers.
Justin Gaudet, propriétaire de la ferme Beauchamp à Memramcook, au Nouveau-Brunswick, a commencé à profiter de ces initiatives l’année dernière. Il a décidé de convertir des zones humides de ses terres en deux étangs, créant ainsi un environnement propice à l’épanouissement de la faune et de la flore. Gaudet explique que le terrain a été transformé pour permettre des usages multiples. En plus de servir d’habitat aux espèces sauvages, les étangs procurent une source d’eau aux vaches laitières lorsqu’elles sont au pâturage.
Gaudet pratique le pâturage intensif afin de réduire le coût des intrants, d’optimiser l’utilisation de ses terres et de préserver la santé de ses animaux. Il explique qu’avec le projet d’étangs – qui n’a pas entraîné de coûts financiers – il a doublé la superficie qui peut être utilisée pour le pâturage intensif ce qui lui permettra de diversifier son entreprise en se lançant dans la production bovine. Ce projet d’étangs contribue également à l’objectif plus large de Gaudet de consacrer 10 % de ses terres agricoles à la préservation des espèces sauvages.
« En travaillant un peu plus avec la nature, ma ferme est devenue beaucoup plus résiliente. Lorsque nous avons des conditions météorologiques extrêmes et des années difficiles, notre exploitation est moins touchée que celles de certains de nos voisins, car notre écosystème est plus résilient », explique Gaudet.
Avantages à long terme
L’adoption de pratiques régénératrices et favorables à la biodiversité permet aux exploitations agricoles de régénérer la productivité et la santé de leurs terres. Les avantages de ces programmes s’observent à long terme et contribuent à renforcer le bien-être économique des exploitations agricoles participantes.
« En encourageant les agriculteurs à mettre en place des pratiques régénératrices sur leur exploitation, la même superficie de terre peut être utilisée pour augmenter la production. Ainsi, ils n’ont pas besoin de défricher davantage de terres, ce qui met un frein à la déforestation. L’entreprise sera plus saine et plus productive sans avoir à utiliser plus d’intrants, ce qui est très rentable pour les agriculteurs. Ces pratiques contribuent également à la santé du sol et de l’exploitation pour les générations à venir », explique McLellan.
Dans sa quête d’autosuffisance pour sa ferme, Gaudet reconnaît l’importance d’optimiser l’utilisation des terres, de préserver la biodiversité et d’effectuer une planification de l’habitat. Travailler avec la biodiversité et les écosystèmes locaux et les favoriser offre de nombreux avantages qui contribuent à la longévité de l’exploitation. Ces pratiques peuvent également être utilisées pour renforcer les liens avec les communautés locales. La ferme de Gaudet est un bon exemple, puisqu’elle est située dans une zone urbanisée. Cela l’a incité à faire des efforts pour intégrer sa ferme dans sa communauté en vue d’en améliorer le bien-être.
Il espère collaborer avec sa municipalité pour développer des sentiers pédestres à travers ses terres agricoles et des passerelles autour de ses étangs afin de maximiser la valeur de ses terres et de les mettre en valeur. Sa vision est claire : transformer ses terres en un atout pour la communauté en contribuant de manière positive à la qualité de vie des personnes vivant à proximité, sans entraver l’activité économique de son exploitation.
« Ma ferme devient une source de fierté pour la communauté et tout le monde peut en profiter. En même temps, nous conservons une activité économiquement viable, » précise Gaudet.
Par où commencer
Pour protéger et restaurer la biodiversité sur leurs terres, les agriculteurs peuvent commencer par mettre en œuvre quelques pratiques simples pour constater des améliorations. Celles-ci comprennent la plantation d’arbres, la réduction du travail du sol, le choix de plantes fourragères plutôt que de cultures annuelles et l’installation de nichoirs pour les oiseaux. Ces petits changements peuvent faire une différence significative dans la promotion de la biodiversité, affirme McLellan.
Ces dernières années, l’accessibilité aux ressources sur l’agriculture régénératrice s’est améliorée. Gaudet, qui a dû faire face à de nombreux défis lors de l’adoption du pâturage intensif, explique qu’il est de plus en plus facile d’entrer en contact avec des exploitations agricoles du monde entier ayant une vision similaire. Il s’agit d’une ressource que davantage d’exploitations agricoles peuvent exploiter et appliquer à leurs activités. Aux agriculteurs qui souhaitent s’engager sur la voie d’une plus grande autosuffisance et des pratiques régénératrices, Gaudet conseille de commencer par acquérir une bonne compréhension de l’environnement unique de leur exploitation. Cette connaissance doit être le fruit d’une observation et d’une réflexion approfondies sur la nature qui se trouve sur et autour de l’exploitation, afin de choisir des pratiques appropriées qui garantissent une coexistence harmonieuse avec la terre.
Selon Wiens, l’un des points forts de ces initiatives est la possibilité de personnaliser les approches de préservation de la biodiversité et de gestion des terres. Il adresse un message similaire aux producteurs laitiers désireux d’adopter des pratiques plus respectueuses de la biodiversité : « Il existe un large éventail de meilleures pratiques de gestion. Les agriculteurs peuvent choisir eux-mêmes les pratiques les plus pertinentes pour leur entreprise et les introduire graduellement. »
Face à l’abondance d’informations disponibles en un clic, Gaudet insiste sur la valeur des connaissances pratiques et de l’apprentissage par l’expérience. « Il y a beaucoup de bonnes informations, mais aussi beaucoup de mauvaises. Le meilleur moyen de les départager est d’utiliser son expérience et les observations réalisées sur sa propre exploitation », affirme-t-il.
À la base, le cheminement vers une production laitière régénératrice débute par un lien profond avec la terre et un engagement à favoriser sa biodiversité, des valeurs que de nombreuses entreprises laitières canadiennes possèdent déjà.
McLellan se dit optimiste quant aux progrès réalisés grâce à ce partenariat. Selon elle, l’amélioration de l’éducation et la connaissance des pratiques agricoles régénératrices ont non seulement permis aux entreprises agricoles de comprendre leur rôle dans la réalisation des objectifs de durabilité, mais aussi d’améliorer leur productivité. « Au Canada, nous avons une histoire très positive à raconter. Nous sommes les gardiens de la terre et nous avons la responsabilité de la préserver pour les générations à venir. Je pense que nous faisons du bon travail à cet égard et que nous allons vraiment dans la bonne direction », affirme McLellan.
En favorisant la biodiversité et les pratiques agricoles régénératrices, les producteurs laitiers canadiens ne se contentent pas de préserver leurs exploitations, ils contribuent également à un avenir agricole plus durable et plus prospère.
Pour en savoir plus sur les programmes proposés aux agriculteurs dans le cadre de ce partenariat, contactez Connie McLellan.