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Le lisier contient des quantités intéressantes d’azote ammoniacal, un liquide contenu dans l’urine du bétail.
L’azote ammoniacal peut être absorbé directement par les racines des plantes, mais entre le moment où il arrive sur le sol de l’étable et celui où il est incorporé dans les champs, le lisier perd une grande partie de son azote dans l’atmosphère sous forme de gaz ammoniaque. La volatilisation de l’ammoniaque pollue l’environnement, en plus de représenter un coût non négligeable pour les agriculteurs qui doivent alors acheter des engrais à gros prix.
Donc, comment transformer un polluant en or vert?
La formation de l’ammoniaque
La première étape est de comprendre comment l’ammoniaque est formé : les selles contiennent une enzyme, l’uréase, qui, au contact de l’urée contenue dans l’urine, décompose l’acide ammoniacal en ammoniac et en dioxyde de carbone. Ce processus est présent pendant toutes les étapes de traitement du lisier : environ 40 % à 50 % dans l’étable, 5 % à 15 % lors de l’entreposage et 40 % à 55% pendant le brassage et l’épandage.
Quelles sont les mesures à prendre pour réduire ce processus biologique? Pour commencer, un raclage toutes les deux heures empêchera le mélange de l’urine et des selles au sol et réduira les émissions d’ammoniaque de 50 %. Le rainurage des passages peut aussi canaliser l’urine et l’écarter des selles entre deux raclages pour créer un environnement plus sain pour le bétail.
Empêcher les pertes pendant l’entreposage
L’étape suivante est de prévenir les pertes pendant l’entreposage où l’urée sera en contact constant avec l’uréase et où le vent dispersera l’ammoniaque. Les fibres dans le lisier vont naturellement flotter en surface et former une croûte qui réduira les émissions d’environ 40 %. Les couvertures flottantes, comme les géomembranes ou les balles de couverture flottantes, donnent une couverture immédiate avec un taux d’efficacité de 60 %. Les toits coniques sur cuves en béton ou en acier fournissent une efficacité de 80 % et les sacs à lisier sont encore plus efficaces.
Quelle que soit la forme d’entreposage, elle ne résout pas le problème des émissions d’ammoniaque – le moment de sa volatilisation est simplement retardé. L’épandage dans les champs requiert le brassage du lisier pour qu’il soit homogène pour faciliter le pompage et une absorption uniforme par les plantes. Dans une lagune ouverte, une quantité importante d’ammoniaque est perdue quand la croûte est dissoute par l’action mécanique du brasseur et quand le lisier entre en contact avec l’air.
La volatilisation continuera pendant l’épandage selon le procédé utilisé. La buse d’épandage est un outil abordable, mais elle maximise la surface du lisier en contact avec l’atmosphère, entrainant des pertes allant jusqu’à 80 %. Les pendillards et rampes à patins réduisent les émissions par un épandage en bandes étroites prêt ou directement au sol. Le système le plus efficace est l’injection dans le sol à l’aide d’injecteurs à disques ou dents.
Empêcher la formation de l’ammoniaque
Jusqu’ici, j’ai décrit des méthodes pour réduire les pertes d’ammoniaque, mais y a-t-il un moyen d’empêcher sa formation? Comme nous l’avons déjà constaté, c’est l’interaction entre une enzyme et l’urée qui crée l’ammoniaque. Cependant, cette interaction n’est possible que dans un environnement alcalin. La solution passe donc par l’augmentation du taux d’acidité du lisier. Dans les exploitations porcines, on ajoute de l’acide sulfurique au lisier, un produit dangereux à manipuler et corrosif pour la cuve.
Un autre moyen d’augmenter l’acidité est à travers l’action des bactéries aérobiques. Celles-ci sont naturellement présentes dans le lisier à température ambiante. Au cours de leur vie, elles digèrent le lisier et réduisent la quantité de solides. Un effet secondaire de cette action biologique est une augmentation progressive du taux d’acidité. Au fur et à mesure que le lisier devient plus acide, l’action de l’enzyme uréase est entravée et la décomposition de l’azote ammoniacal est ralentie.
Le seul inconvénient des bactéries aérobiques est leur besoin en oxygène pour se multiplier, alors que le lisier est un environnement reconnu pour son manque d’oxygène. Le seul moyen de stimuler l’action biologique des bactéries aérobiques est de réduire leur quantité de travail et oxygéner le lisier. Pour réduire leur charge de travail et la demande d’oxygène, un séparateur peut être utilisé pour enlever la fraction solide du lisier. Combiné avec un système d’aération, les bactéries auront suffisamment d’oxygène pour digérer le lisier séparé.
Les systèmes d’aération utilisent des compresseurs à basse pression et à haut débit pour pomper de l’air de manière séquentielle à travers des diffuseurs spécialement conçus et installés à des intervalles réguliers au fond des cuves (voir Figure 1). Chaque diffuseur est relié par son propre tuyau à un bloc de vannes hors du lisier et un anneau permet sa mise en place à l’aide d’une corde ou d’un crochet. Si les diffuseurs doivent être enlevés, ils peuvent être sortis à la main sans vider la cuve.
L’air pompé à travers ces diffuseurs sort sous forme de petites bulles qui remontent à la surface lentement. Les systèmes d’aération traditionnels créent de grandes bulles qui remontent rapidement et éclatent au contact de la surface. Les petites bulles utilisent la tension superficielle pour flotter sous la surface et retarder leurs éclatements. Elles ont aussi une surface de contact plus importante avec le lisier et, combiné à leur durée de vie plus longue, augmente le taux d’oxygénation.
Un effet secondaire utile des bulles est de brasser le lisier et d’empêcher la formation d’une croûte. En plus d’augmenter la surface en contact avec l’oxygène, le lisier reste homogène et toujours disponible pour l’épandage.
Le lisier est souvent considéré comme un inconvénient pour les exploitations, mais une bonne gestion peut transformer un problème en une ressource précieuse. Avec la volatilité récente du prix des engrais et la focalisation croissante sur l’agriculture comme source de pollution, la gestion intelligente du lisier est désormais difficile à éviter.
Julian Lopez est responsable de l'exportation de Storth Ltd.